L'histoire du livre d'or de Paul Bocuse et pourquoi la dernière signature est celle d'un juge d'instruction

L'histoire du livre d'or de Paul Bocuse et pourquoi la dernière signature est celle d'un juge d'instruction

D'innombrables personnalité ont défilé chez Paul Bocuse à Collonges-au-mont-d'Or.

La plupart ont signé le fameux livre d'or du restaurant étoilé. Jusqu'à ce que le pape de la gastronomie décide de le faire disparaître.

Durant toutes ses décennies de carrière, Paul Bocuse a reçu dans son restaurant des milliers de célébrités : acteurs, chanteurs, sportifs, chefs d'entreprise, hommes politiques... Notamment Jean Gabin et Sophia Loren qui sont venus chez Bocuse au début des années 1970 lorsqu'ils tournaient ensemble "Le Verdict" à l'Ile Barbe. Mais aussi Bourvil en tournée à Lyon pour sa comédie musicale "Ouah" et Brigitte Bardot, qui, venue sans réserver dans les années 1960, avait été obligée de manger en terrasse avec son manteau de fourrure.

On pense aussi à Paul McCartney, qui s'était spontanément mis à chanter pour l'anniversaire d'une grand-mère assise à la table d'à côté. Sans oublier l'inconditionnel de la maison Sacha Guitry, Miles Davis, Charles Aznavour, Gérard Depardieu, Jeanne Moreau et de nombreux chefs d'Etat comme le général de Gaulle, Mikhail Gorbatchev, Valéry Giscard d'Estaing...

La plupart d'entre eux ont bien sûr signé le fameux livre d'or, situé à l'entrée du restaurant. Pourtant, en 1980, Paul Bocuse décidera de mettre fin à cette tradition. "J'ai toujours trouvé que c'était une idée débile ! Parce que les clients ne savent jamais quoi écrire ou alors ils se sentent obligés d'être sympas", nous expliquait le chef avant son décès.

Paul Bocuse racontait même avoir perdu le livre après l'avoir sorti pour la dernière fois à la demande du juge d'instruction Philippe Courroye.

Une sacrée histoire qui commence quand, dans les années 1990, le chef de Collonges est convoqué par le juge qui enquête sur le scandale politico-financier qui met en cause le maire de Lyon Michel Noir et son directeur de campagne et gendre Pierre Botton.

Philippe Courroye épluche la moindre facture, étudie la moindre dépense du duo Noir-Botton, alors soupçonné d'avoir commis des malversations pour financer la carrière politique de l'édile.

Parmi les dépenses qui intéressent le juge, un déjeuner réalisé chez Bocuse en 1985 avec 16 autres personnes. Michel Noir et Pierre Botton juraient avoir payé la note du restaurant de leur poche, mais la facture restait introuvable.

Accompagné de trois inspecteurs de police, Courroye débarque alors à l'Auberge de Collonges pour trouver ladite facture. Après avoir fait chou blanc, ils décident de déjeuner sur place. Et à la fin du repas, le juge demande à consulter le livre d'or, pensant pouvoir retrouver la signature de Noir ou Botton.

Là encore, c'est raté. Le magistrat inflexible en profite tout de même pour signer lui-même le livre d'une petite phrase ironique qui sera la dernière à y être inscrite : "Quand je déjeune chez Bocuse, ça m'enlève mes idées noires !".

Peut-être conscient des problèmes que ces signatures pourraient causer à certains clients volages voire hors-la-loi, Paul Bocuse le fit disparaître définitivement, racontant à qui voulait l'entendre qu'il ne savait même plus où il l'avait rangé.

Le chef était très proche de Pierre Botton et cette affaire l'avait secouée. Son soutien au gendre de Michel Noir était resté fort, il alla même jusqu'à lui porter personnellement un repas le soir de Noël dans sa cellule de prison en 1996...

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